Mise en scène absolument fantastique, Geoff Tate complètement habité, technique excellente, indéniable amour et respect du public

Note globale


Musicalement pas au niveau de perfection des années 88/95, les sous-titres des paroles qui ont disparu

Editeur : Warner Music Vision
Durée totale : 2 h 58

- (PCM)

Image        NTSC (Oui, même en Zone 2 !)

Sous titres fr uk sur quelques interventions
Galerie de 35 photos
The Chase en duo avec Ronnie James Dio (3 min 16/9 5.1)
Documentaire sur la tournée (23 min 16/9 st fr uk)
Queensrÿche's Rock & Ride (2 min 16/9 non anamorphique (!) st fr uk)

Le 16/9 est cinématographique, la définition superbe, la réalisation excellente, les couleurs aussi profondes que les noirs, et la compression est totalement absente même pendant les moments de flashes de textes, seul défaut qui, court, techniquement ok, artistiquement justifié, ne mérite pas de baisser la note maximale.
Stereo très live, très brute, propre et très honnête, 5.1 trop bordélique mais qui a été travaillé sans l'ombre d'un doute. Il y a le côté "pauvre" du son Rÿche depuis Q2K, mais la sincérité et le public dément en font une agréable surprise. Adorateurs du gros son factice de LiveCrime, descendez la note à 8 voire 7.
Première partie pas toujours bien jouée (ouh les choeurs !), seconde partie très bancale, deux rappels archi-entendus, mais au final un concert particulièrement enthousiasmant, et puis il ne faut pas oublier le chanteur qui vaut à lui tout seul l'achat du disque.
Outre le documentaire le plus court de l'univers (coucou, on aide les enfants avec les motos, on... hop ! fini), on a droit à un making-of qui aurait franchement mérité autant de soin que le spectacle lui-même. Un peu court de ce côté-là, dommage.

Souvenez-vous : on les avait laissés pour morts. Queensrÿche, le groupe mythique de metal semi-progressif, avait sorti un DVD genre bootleg, tres court, filmé par des amateurs, monté par quelqu'un dont on est en droit de se demander s'il est lui-même professionnel, avec un son de concert ridiculisé par... le menu (!), plein de chansons franchement pas parmi leurs meilleures, et enfin un groupe invité (depuis frères ennemis) qui niveau talent et crédibilité les pulvérisaient. Bref, pour le monde du DVD musical, Queensrÿche etait décédé, et pire, pour le monde plus général du rock, le groupe n'était pas mort, mais dégageait une drôle d'odeur, pour reprendre Frank Zappa. La pente semblait impossible à remonter. Et ce ne fût pas leur album suivant qui les aida. Operation : Mindcrime II, la suite de leur mythique album-concept, n'était pas vraiment un mauvais album, il était en tous cas bien plus ambitieux que les trois albums précédents, mais son patronyme suffît à le condamner derechef auprès de toutes les générations de fans. Aveuglément, certes, mais inéluctablement. Aussi, lorsque le groupe annonça une tournée où il reprendrait in extenso les deux albums Mindcrime joués bout à bout, la remontée qualitative amorcée fut rapidement ensevelie sous des tonnes de doutes.

Ce double DVD sorti chez Rhino est donc la captation live des trois représentations qu'ils donnèrent à Seattle. Une sortie ayant fait les frais de nos moqueries avant même son achat, puisque ledit concert n'était qu'en Zone 1, et le Zone 2 se fit attendre plus d'un mois, pour un prix supérieur, du NTSC au lieu du PAL attendu, et le joli fourreau en moins. Travailler moins pour gagner moins ? Bref, le voilà, ce fichu disque dont tout le monde parle, il contient les deux albums séparés (un disque par album, donc), et en l'insérant la tension monte : seront-ils pathétiques, ou juste moyens ?

Deux heures plus tard, le doute n'est plus permis : Queensrÿche est de retour. Vous attendiez un concert ? C'est là que Geoff et Susan Tate se sont rattrapés de la bourde de 2004.

Après les applaudissements de la foule survoltée (ça a beau être à domicile, c'est toujours plaisant à entendre), le show débute. Et très vite, on s'en rend compte : ce n'est pas un concert, mais bel et bien un spectacle auquel nous allons assister. Et ça, c'était inattendu. Une fois l'intro (mythique) en dessin animé finie, vient la première surprise. Un peu cheap, pas très bien mixée, mais c'est une surprise, qui vous met le sourire jusque là... Et le disque a démarré depuis à peine trois minutes ! Et arrive Geoff Tate, qui, avouons-le, était quasiment notre préoccupation principale. Il ouvre la bouche et vous, vous n'avez plus qu'à fermer la vôtre pendant deux heures. Totalement survolté, impliqué à fond dans son (ses ?) personnage(s), il délivre une prestation hallucinante, et je pèse mes mots. Vocalement, il fait bien sûr quelques couacs, mais globalement il est épatant vu son âge et la hauteur des notes, et les passages vraiment trop exigeants se voient intelligemment adaptés. Mais il n'y a pas que la voix qui époustoufle : en tant qu'acteur "théâtral" (nous sommes à un concert de metal, pas dans un Zhang Yimou), il est à fond dans son rôle, parfois touchant, parfois narcissique, quelquefois même cynique. Il débute d'ailleurs le concert en brandissant un panneau qui n'a pas manqué de faire jaser : "que quelqu'un fasse une pipe à Bush, comme ça on lancera une procédure d'impeachment !". Vé l'ambiance.
L'autre question en suspens était le groupe. Outre le fait que le concert soit truffé de bandes et de vrais synthés, cachés hors-scène, il faut tout de suite préciser que la partie I n'a pas la perfection du génial DVD LiveCrime. La faute sûrement à Mike Stone, bon guitariste mais qui a encore beaucoup de mal à se glisser dans la peau de Chris DeGarmo, il est loin d'avoir sa fluidité, et ça s'entend d'autant plus que Rockenfield, Wilton et Jackson sont impériaux et jouent parfaitement leurs partitions rôdées comme un axe de 45 depuis 18 ans. La faute peut-être aussi à quelques nouveaux arrangements, qui cependant contribuent fortement à donner au concert l'identité qu'il possède en réalité : une comédie musicale. Car c'en est une, ne vous leurrez pas, l'unique raison pour que ce DVD ne soit pas classé ici comme tel est le trop faible nombre de personnages. Sinon, vous avez tous les ingrédients d'un musical de Broadway, y compris une épice là encore inattendue : la mise en scène.
Fini les guitares pourraves avec le chanteur en marcel portant bérêt et couinant Lose Myself. Queensrÿche a compris que, pour reconquérir une place de choix sur la carte du Tendre metallique, cela passait par la case "mettre les moyens". La mise en scène est donc millimétrée, et rappelle les spectacles débutants à Broadway : pas de somme exubérante d'argent sur scène mais chaque détail mûrement réfléchi, des décors efficaces, tous les vieux trucs du théâtre repris et améliorés, bref en prime d'un concert de plus de deux heures, les spectateurs en ont eu pour leur argent. Le montage est d'ailleurs particulièrement bon étant donné que le tournage s'est fait sur trois jours, et on dénote peu de fautes de raccord, ce qui prouve le sérieux de la mise en scène. Il y a également un gimmick consistant à afficher en gros sur l'écran quelques mots chocs : pas terrible, mais rare et court. Quelques acteurs viennent compléter le tableau, ainsi que les fameuses séquences filmées dont plus de la moitié a été rajoutée au film original, et enfin, le retour sur scène de la belle Pamela Moore, qui vocalement carbure au diesel (sa voix et celle de Tate mettent un bout de temps pour se marier) et physiquement passe de l'ange au démon, du blanc au noir, et avec son physique typique de M.I.L.F. lubrique, il faut avouer que même en bonne sœur, on remarque plus ses atouts que sa foi. Là aussi, sa présence, même pas complètement une réussite, est un plus pour le fan et apporte une fraîcheur indéniable.
Reste le cas de la seconde partie : c'est vrai que musicalement, elle est inférieure, aucun doute là-dessus, mais elle bénéficie en revanche d'un rendu live beaucoup plus fidèle que le premier opus, ce qui est normal (mêmes musiciens), et ce malgré quand même quelques petits manques niveau arrangements - ce qui permet d'éviter le syndrome "trop de bandes". La prestation arrivera-t-elle à réhausser le niveau de Mindcrime II ? Peut-être, car les chansons les moins bonnes restent toujours en-deçà, et le moyen The Chase, malgré la voix de Ronnie James Dio, se voit plombée par un film de projection qui, au contraire de tous les autres, est d'un cheap consommé et d'un ridicule fini (Geoff Tate sur sa moto ressemble au coyote qui poursuivrait Docteur Bip-Bipx). En revanche, oui, les bonnes chansons sont encore meilleures, notamment au niveau des chœurs, et la mise en scène - toujours elle - vous fera passer un moment agréable et pas ou peu ennuyeux, même si vous haïssez Mindcrime II avec la dernière énergie. Les deux rappels, deux titres surjoués certes mais ô combien enthousiasmants dans ce contexte, ne laissent aucun doute : le public est ravi, aux anges, bluffé par ce qu'il vient de voir, et en redemande. Nous aussi.

Franchement, qui aurait parié sur ce cheval ? Pas nous en tous cas, et la surprise est d'autant plus forte. Rhino oblige, l'écrin est à la hauteur ou presque : l'image est simplement magnifique, la compression nickel (avec une heure par disque, encore heureux), le montage comme on l'a vu évite beaucoup d'écueils, et on ne rate rien ni des musiciens, ni de la mise en scène, ni des projections. Le son est à niveau : la stereo se défend (mais elle n'a pas la puissance de LiveCrime) et le 5.1 est surprenamment excitant ! Il est parsemé de spatialisations et d'effets surround inattendus. Le hic, c'est que ces effets ne sont pas constants, comme la présence très agréable mais fluctuante des claviers sur l'arrière. On ne va pas cracher dans la bonne soupe, c'est juste un petit regret, comme celui d'avoir mis des sous-titres uniquement sur les interventions et les écriteaux, mais pas les paroles (ce qui faisait la force de LiveCrime). Les bonus ne sont pas non plus tous passionnants : un duo réel (et non plus virtuel) avec Dio, une chevauchée à moto pour une bonne cause, et un making-of qui aurait pû être passionnant mais au final se trouve trop bordélique pour être honnête. Tout ça n'empêchera pas ce Mindcrime at the Moore de se hisser au rang des meilleures galettes de l'année, avec un savoir-faire, un sens du spectacle, une générosité envers le public et une implication artistique qui ne peuvent pas être remis en cause. Est-il donc aussi bon que LiveCrime, puisqu'ils partagent la même note ? Non, ils sont totalement différents. 9/10, ça peut paraître beaucoup pour un tel produit, mais on ne peut pas minimiser le retour en force d'un groupe qui depuis dix ans, pour reprendre du Thiéfaine, ne savait plus quoi faire pour nous décevoir. La route est droite, mais la pente est forte, disait le grand sage poitevin, et au bout, il y a le succès : pourvu que Queensrÿche continue de pédaler, la fringale a assez duré, il est temps désormais de montrer qu'ils ont réellement faim. Et ils viennent de le faire. REVOLUTION !


22-01-2007


13, 14 & 15 octobre 2006 - Moore Theatre (Seattle, U.S.A.)


01. I remember now
02. Anarchy-X
03. Revolution calling
04. Operation : Mindcrime
05. Speak
06. Spreading the disease
07. The mission
08. Suite Sister Mary
09. The needle lies
10. Electric requiem
11. Breaking the silence
12. I don't believe in love
13. Waiting for 22
14. My empty room
15. Eyes of a stranger

16. Freiheit Ouverture
17. Convict (NDBaker : Court. Très court)
18. I'm American
19. One foot in hell
20. Hostage
21. The hands
22. Speed of light
23. Signs say go
24. Re-arrange you
25. The chase
26. Murderer ?
27. Circles
28. If I could change it all
29. An intentional confrontation
30. A junkie's blues
31. Fear city slide
32. All the promises

33. Walk in the shadows
34. Jet city woman


Geoff Tate, Pamela Moore, Ronnie James Dio - Chant   
   Michael Wilton, Mike Stone - Guitare, choeurs
Eddie Jackson - Basse, choeurs   
   Scott Rockenfield - Batterie